L’urgence, dit-on, commande. Même s’il a fallu un an, entre la décision et le moment où les premiers euros arrivent. Heureusement, on n’a pas attendu pour dépenser. La France devrait mettre 60 ans à rembourser la dette Covid. L’Allemagne sept ans. Embêtant pour l’équilibre européen. Mais si la France se muscle un peu, qui sait, on pourrait aller plus vite. D’autant que le plan d’urgence ne distribue pas les prêts contractés en commun selon la règle habituelle des dépenses, mais selon la gravité de la crise Covid dans chaque pays. Ainsi l’Italie, l’Espagne et la France, la Grèce, le Portugal reçoivent plus qu’elles n’auraient obtenu selon les règles proportionnelles en vigueur. La vraie question que posent les prêts, c’est de savoir où on met l’argent. Acheter du chocolat ou investir dans de nouvelles machines ? Et où ? En géopolitique, la réponse est facile. L’Allemagne et les autres pays européens ont compris que si l’Europe du sud, par sa faiblesse, divorçait de l’Europe du nord, alors il n’y aurait plus d’Europe du tout, plus de marché unique, plus de clients, des petits bouts rançonnés par la Chine ou l’Amérique. L’Europe méditerranéenne s’essouffle, alors que celle du nord s’active. Il faut regarder l’insolence de l’Irlande : quand les États-Unis proposent un taux d’imposition minimale sur les sociétés, le G7 approuve, et l’Irlande ose dire non ! Ce n’est pas la Grèce qui pourrait dire non. Quand elle l’a dit, deux fois, elle a coulé. Elle a donc fait comme si elle avait dit oui. Plus personne, en Grèce, ne songe à quitter le nid de l’euro. S’il n’est pas douillet, il y a un toit.
Par Laurent Dominati | Illustrations Fernand Léger
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