Je voudrais brièvement évoquer ici, parmi tant d’autres, le mythe de Thésée, un héros pour aujourd’hui. Thésée n’était ni un Dieu, ni un demi- dieu, ni un prophète... On dirait aujourd’hui que c’était un homme politique ayant fait une brillante carrière en finissant comme Roi d’Athènes après avoir « mis de l’ordre » sur les rivages du détroit de Corinthe littéralement occupé par des bandits de grand chemin. Pour nous, qui sommes culturellement méditerranéens, nous pouvons aimer sans réserve le héros né à Trézène, fils d’Égée, courageux jusqu’à se mettre à la place d’un otage pour s’approcher du Minotaure et le tuer. C’est ce monstre, à tète de taureau et à corps d’homme qui est la représentation du mal, la guerre, l’épidémie, le mensonge, la dictature, le carnage. Il est enfermé dans un labyrinthe construit par Dédale, une sorte d’enfer humain dont on ne peut sortir. Seule, une jeune fille dont on nous dit qu’elle était très belle, Ariane, a finalement trouvé la solution que désormais tout le monde connait : c’est la pelote de laine de sa grand-mère ! Si nous suivons ce fil auquel Thésée a fait confiance nous savons que nous pouvons nous en sortir et l’amour d’une femme sauve les otages athéniens destinés à être tués par le monstre, mi dieu, mi bête... Le labyrinthe pourrait être une image du monde d’aujourd’hui : impossible de le comprendre, difficile d’en sortir, une sorte d’impasse... Chère Ariane, comment pourrions-nous ne pas vous aimer ? Même si nous avons peur d’avoir perdu le fil de
notre existence ! On sait que vous étiez la sœur de Phèdre, on sait que vous avez été abandonnée sur la plage de Naxos où vous dormiez, on sait que le labyrinthe a été construit par Dédale qui eut pour fils Icare, l’homme qui voulait s’envoler... ! Comme on le comprend ! Bien sûr Thésée existe encore ! De Plutarque à Racine, de Picasso au cinéma d’aujourd’hui, il s’est chargé de sens pour nous qui en manquons souvent... L’histoire du Minotaure a traversé le temps et son épaisseur de plusieurs millénaires. Elle n’est sans doute pas sur Facebook, elle n’est pas « à la mode » dans ce monde aveuglé où la mort semble une réalité surprenante... Et pourtant ! Sur une amphore que l’on peut voir au musée du Louvre, datée du 6e siècle avant J.C. cette histoire est peinte par un artiste inconnu, elle a été racontée par des poètes inconnus, transmise de génération en génération dans des villages crétois que nous ne connaissons pas et elle est encore vivante.
Par François Léotard
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