Parlant récemment de « décivilisation », le chef de l’État prend-il enfin la mesure de l’ensauvagement de la société française auquel il semblait jusqu’alors ne prêter qu’une attention flottante ? Des esprits subtils vont sans doute il est vrai nous expliquer que ces deux questions n’ont rien à voir l’une avec l’autre ; l’ensauvagement étant un fantasme d’extrême-droite alors que la décivilisation est une régression certes regrettable, inquiétante même, mais sans rapport avec la récupération politique des « haines », gratuites bien sûr car issues de préjugés qu’il convient d’éradiquer au plus vite. Il y aurait donc, on l’aura compris, deux manières bien différentes de régresser vers la barbarie : l’une relativement honorable dans la mesure où la civilisation, menacée dans ses fondements, constitue encore malgré tout un garde-fou face à des dérives inacceptables ; et l’autre à ce point détestable qu’il est préférable de n’en plus parler. Jusqu’où va-t-il donc falloir que la France se décivilise à force de s’ensauvager (ou vice versa) pour que l’on consente enfin à reconnaître que ce sont là les deux versants d’un même à-pic culturel et social qui peut tôt ou tard se révéler fatal ?
Par Françoise Bonardel – Illustrations Banksy
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